MATHIEU, 36 ans: « Je ne voulais pas signer. »
MATHIEU, 36 ans :
A faire comme les autres ou à passer par les mêmes chemins que les autres, on arrive aux mêmes endroits. On obtient les mêmes choses.
Tant de gens aimeraient du changement dans leur vie tout en continuant à faire ce qu’ils ont toujours fait, ou ce que leur entourage a toujours fait.
CHAPITRE I
Il y a quatre ans, alors que j’étais consultant, mon employeur a été soumis à un renouvellement d’appel d’offre. L’objectif était de continuer à placer l’équipe dont je faisais partie chez le client où nous étions. Mais pour éviter la fuite des consultants vers une autre société qui répondait à ce même appel d’offre, mon employeur avait proposé une prime d’un montant de trois fois notre salaire.
La condition était de signer une clause qui nous empêchait de se laisser débaucher par la concurrence.
Il avait alors justifié cette prime comme étant une récompense pour notre fidélité, et dont nous bénéficierions si nous signions ce document. Et, bien sûr, si l’appel d’offre était remporté.
Je ne voulais pas donner ma signature.
Nous avions un délai de réflexion que j’ai utilisé presque jusqu’au bout. Je savais que mon intention était, selon moi, juste, mais, tout de même, j’hésitais. Je me demandais ce que ma hiérarchie allait en penser et quel allait être l’impact de ma décision.
Je n’ai pas demandé conseil autour de moi. Par contre, je disais ouvertement à mes collègues ma position et que cette proposition me semblait être du foutage de g*****.
J’espérais, en disant cela, avoir un retour de leur part. Savoir si je faisais le bon choix.
Mais les mises en garde ne tournaient qu’autour de la prime que j’allais louper.
Nous n’étions pas récompensés de notre fidélité (ce qui aurait pu être le cas quand quelques semaines auparavant plusieurs d’entre nous demandaient des augmentations). Selon moi, le but était simplement d’empêcher le concurrent principal de remporter l’appel d’offre en s’appuyant sur certains de nos profils.
Cette démarche ne me correspondait simplement pas.
J’ai alors définitivement refusé de signer le document qui me réservait à mon employeur.
Je n’ai pas touché ma prime.
Et j’en suis fier.
Je me suis d’abord demandé si j’avais eu raison d’agir comme ça. J’étais le seul. Tout le monde avait accepté de signer ce document.
Mais plus le temps passait, plus j’étais fier d’avoir fait ce choix.
J’avais l’impression que la majorité de mes collègues étaient d’accord avec mes principes, mais qu’aucun ne souhaitait suivre ma décision sous peine de ne pas recevoir de prime.
Aujourd’hui, je vois tout cela comme un moment pendant lequel j’ai pu faire respecter mes valeurs et mes convictions. Même si j’étais seul. Même si une belle somme pouvait être perçue.
J’y repense avec fierté parce que mes valeurs ont été respectées et parce que j’ai été le seul à les respecter (sur ma trentaine de collègues concernés).
Après cet événement, leur regard a changé.
J’avais l’impression d’être plus inspirant qu’avant. On me suivait plus facilement et on m’écoutait plus. J’avais acquis plus de charisme et je manageais mon équipe plus facilement.
Je ressens cette décision comme une (re)naissance. Celle de mon estime de soi, de ma détermination et de la personne que je suis devenue ensuite.
Une personne grandie selon moi.
Je n’ai pas accepté la route empruntée par tous, j’ai choisi la mienne.
Je ne sais pas si mon père s’est un jour retrouvé dans une situation similaire, mais la détermination que j’ai mise dans cette expérience en faisant valoir avant tout mon intégrité vient clairement de lui.
Si je devais donner un conseil à quelqu’un qui se trouverait aujourd’hui dans une situation similaire, je lui dirais d’écouter son cœur. Où veut-il aller ? Que veut-il faire ? Comment se sentira-t-il s’il fait comme tout le monde alors qu’il a envie de faire autrement ? Le regrettera-t-il ?
Ce n’est pas facile. Si cela l’était, tout le monde pourrait effectuer les changements qu’il souhaite, tout le monde emprunterait ce chemin vierge.
Il faut peut-être juste retrouver le goût de l’aventure.